Le Maroc a subi ces derniers jours de virulentes critiques pour le traitement réservé au dossier des immigrants subsahariens. L’Espagne n’échappe pas non plus aux reproches des associations internationales des droits de l’Homme.
C’est ce lundi 10 octobre que Miguel Angel Moratinos est attendu au Maroc. Le ministre espagnol des Affaires étrangères, lors des rencontres de travail qu’il aura avec les responsables marocains, évoquera l’épineuse question de l’immigration subsaharienne et les récents assauts contre les clôtures entourant les présides de Mellilia et Sebta.
Comme l’ont annoncé les responsables espagnols, cette visite sera l’occasion d’étudier les moyens d’intensifier la coopération entre les deux pays pour une meilleure gestion de ce dossier qui leur attire actuellement les plus acerbes critiques.
Le Maroc a été montré du doigt pour avoir cherché à exercer le droit de protéger les frontières comme le stipulent les règles de droit international et les engagements de tout pays. Dans le lot de remontrances faites à Rabat, plusieurs ONGs stigmatisent le traitement qualifié d’ «inhumain» par les ONGs. Quand les médias s’en mêlent, le vacarme s’intensifie et surtout quand il s’agit d’une ONG comme Amnesty International qui épingle l’Espagne et lui demande d’arrêter les expulsions d’immigrants subsahariens vers le Maroc, pays dont les autorités sont soupçonnées de tous les dépassements.
Les critiques fusent de partout, de l’Europe et même d’ONGs représentant les Marocains comme ATIME (Association des travailleurs immigrés marocains en Espagne) qui affirme s’apprêter à poursuivre le Maroc en justice.
L’avalanche des critiques adressées à l’Espagne et au Maroc se complète par ses termes à peine voilés du secrétaire général de l’ONU qui se dit «préoccupé» par ce qui se passe dans cette partie de l’Afrique, aux portes de l’Europe. Madrid comme Rabat font la cible de tirs croisés. L’Espagne, pays européen, interpelle quand ses forces ne tirent pas à balles réelles dans le flot d’immigrants, et expulse.
Le Maroc, pays pris au piège par sa situation géographique et un flux ininterrompu de ressortissants subsahariens, refoule dans des conditions inhumaines, voire torture et affame. Le raccourci est des plus aisés. Le Maroc a bel et bien signé un accord de rapatriement avec l’Espagne en 1992, mais cet accord a très peu servi et à quelques rares occasions.
Aujourd’hui, les deux pays le déterrent pour faire face à une situation exceptionnelle rendue plus intenable par les assauts répétés, et de plus en plus violents, contre les frontières des présides marocains de Sebta et Mellilia. La Commission européenne, elle, cherche à «arracher» plus, amener le Maroc à la signature d’un accord de rapatriement en vertu de quoi le Royaume s’engagerait à accepter que soient rapatriés sur son sol ses nationaux, mais aussi les immigrants subsahariens ayant emprunté ses territoires. Pour cela, le Maroc ne dispose ni des moyens financiers, ni de l’expérience requise pour faire face à cette situation.
L’Espagne, débordée, demande plus de soutien de la part de l’Europe. Le même soutien, «plus actif» selon les termes de Zapatero, est requis pour le Maroc. Le chef du gouvernement espagnol affirme aussi que l’Algérie doit coopérer. Pays presque jamais cité dans les drames qui se jouent entre le Maroc et l’Espagne, l’Algérie est pourtant le principal point d’arrivée des immigrants subsahariens. «El Watan», quotidien algérois, vient d’affirmer que près de 2.000 ressortissants subsahariens, massés depuis des mois à quelques kilomètres de Maghnia, ont quitté la région à destination des frontières marocaines pour rejoindre Mellilia ou Sebta. Médecins sans frontières, pour ne citer que cette grande ONG, s’émeut du sort de ressortissants subsahariens qui auraient été relâchés dans le désert marocain, mais ne fait rien pour ceux, des centaines, qui vivaient pendant plusieurs mois sur les berges d’une rivière près de Maghnia dans des conditions dramatiques.
Le Maroc remplit, sans en avoir les moyens, ses engagements envers l’Espagne en accueillant jeudi dernier plus de 70 personnes. Madrid, qui cherche à sceller des accords avec des pays africains, pour des rapatriements aux pays d’origine, affirme que le Maroc a présenté toutes les garanties nécessaires. Les deux pays y verront plus clair après les rendez-vous programmés dès aujourd’hui entre responsables marocains et espagnols.
Rien que dans la région de Nador, les autorités locales affirment avoir interpellé près de 7.000 immigrants subsahariens depuis le début de l’année et jusqu’au 7 octobre. Pour en finir avec ce casse-tête, les autorités viennent de décider de raser les forêts (entourant les deux enclaves de Sebta et Mellilia) où se cachent les Subsahariens ! A vouloir résoudre un problème, le Maroc en crée un autre plus grave, écologique celui-là.
Par : Mohamed Boudarham
Aujourd'hui Le Maroc